DECONFINEMENT
La liberté, aussi, de s’attarder devant les tableaux d’une expo
Premier épisode de notre série consacrée à ses lieux qui se déconfinent et reprennent vie. A peine rouverte, la chapelle des Dominicaines de la rue de Verdun accueille une exposition : « Fengjing », peintures et encres d’Antoine Dubruel.
Un amateur d’art discutant avec un peintre dans une salle d’exposition : à l’image des gens en terrasse, on n’avait pas vu ça depuis des mois. Bonne nouvelle, ces échanges sont redevenus la norme à la chapelle des Dominicaines de Carcassonne, qui a rouvert ses portes ce mercredi 19 mai en donnant à voir une toute nouvelle exposition. Un appel au voyage et à la découverte auquel Henri a cédé bien volontiers.
« Je ne m’attendais pas à ce qu’une expo soit déjà proposée, explique-t-il. J’ai vu que la salle était ouverte, et les couleurs des toiles m’ont attiré. En plus, l’espace est lumineux et incite à se plonger dans le travail de l’artiste. Or, celui-ci est très intéressant ! » L’artiste en question se nomme Antoine Dubruel. Fengjing, son exposition, était programmée sur place… il y a un an.
Paysage mental
« C’était la fin du premier confinement, j’ai préféré reporter, raconte-t-il. Cette réouverture s’accompagne d’une forme d’excitation, car cela fait deux années que je n’avais ni exposé, ni rencontré du public. Être présent le jour J, c’est important. C’est comme dire : je suis toujours là ! Au début, j’ai éprouvé une certaine colère en apprenant la date de réouverture, car ça nous faisait manquer le week-end de l’Ascension. Mais c’est finalement mieux ainsi, car en ouvrant plus tôt je n’aurais jamais eu le temps de réaliser cet accrochage, cette mise en scène. Cela m’a pris quatre jours non-stop ! » Ce n’est donc pas un hasard si l’oeil avisé d’Henri a été titillé dans la rue.
Avec ses paysages d’huiles ou d’encres de Chine volontiers grand format, Antoine Dubruel façonne en effet un univers très personnel qui capte aisément les regards. Outre cette patte esthétique caractéristique, la nature même des panoramas représentés évoque un ailleurs indicible, quelque part entre rêve et réalité. Et pour cause : ces horizons n’existent pas. « J’extirpe des choses du monde tel qu’il est, puis j’invente mes compositions » résume Antoine Dubruel. En résulte un concept de « paysage mental », fruit d’une lente maturation guidée par l’imaginaire de l’artiste.
« Il y a toujours trois étapes. Je pose d’abord un travail mêlant aquarelle, pastel ou encore fusain, puis vient le dessin à l’encre de Chine et enfin la peinture à l’huile. Mais il peut s’écouler pas mal de temps entre chaque réalisation, ma perception va évoluer et les oeuvres seront toujours différentes. » Henri, pour sa part, est conquis. « Sur un plan pictural, ça sort de l’ordinaire ! » Et de poursuivre un peu la discussion avec l’artiste : le genre même de petit bonheur dont on prend désormais pleinement conscience, après en avoir été privé si longtemps.
Lionel Ormières
Vendredi 21 mai 2021
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